Peinture murale des marchands – entre 618 et 907 – les Grottes des mille bouddhas de Bezeklik

 

Les grottes des mille bouddhas de Bezeklik

 

 Peinture murale des Marchands

Dynastie Tang – entre 618 et 907

Dim 64 x 114 cm

Peint sur le mur sud de la grotte n°45 à Bezeklik.

 

I – Les grottes des mille bouddhas

 En 1907 aux confins du nord-ouest de la Chine, un explorateur anglo-hongrois découvrit des manuscrits et des peintures uniques ensevelies depuis des millénaires sous les sables du désert de Taklamakan.

Pendant plus d’un millénaire l’antique ville-frontière de Dunhuang fut la dernière image de la Chine que les caravaniers de la route de la soie emportaient avec eux avant d’affronter les terribles dangers de l’Asie centrale.

Pour les étrangers occidentaux arrivant pour la première fois dans ces contrées reculées, Dunhuang constituait leur première prise de contact avec la plus grande civilisation du monde. Que ce soit pour exprimer leurs espoirs ou leur gratitude envers cet empire qui les accueillait, ces voyageurs transformèrent les grottes situées près de Dunhuang en une gigantesque galerie d’art.

Alors que tous les voyageurs devaient lutter contre l’administration locale, ils ressentaient le besoin de rendre hommage à leurs divinités au cœur des temples troglodytes creusés dans les falaises de grès de Mogao, à l’extérieur de la ville.

La construction de ces temples débuta en 366 par un moine répondant à une vision.

Au fil du temps, pas moins d’un millier de grottes furent creusées sur le site, dont 492 furent préservées. La plus grande mesure 40 mètres de haut sur 30 mètres de large ; la plus petite est une niche de 30 centimètres.
Près de 45000 mètres carrés de fresques recouvrent les parois rocheuses, représentant le paradis, relatant des légendes, honorant des divinités ou encore appelant à la méditation.
Environ 2400 figurines en terre cuite, d’une taille allant de 10 cm à 330 cm, furent découvertes dans les grottes.

Dunhuang était depuis longtemps engloutie par les sables quand en 1907, l’explorateur Aurel Stein découvrit un trésor inestimable constitué de documents et de peintures presque intacts enfouis dans une grotte.

Parmi les milliers de parchemins, se trouvaient des comptes rendus administratifs, des procédures juridiques et des descriptions du quotidien dans une ville frontière médiévale, mais aussi des documents attestant l’ascension et la chute de pouvoirs politiques rivaux dans cette zone stratégique de la Chine, principalement les Tang et les empires tibétains.

Des textes imprimés, des cartes astronomiques et des partitions de musique furent également mis à jour, révélant des avancées scientifiques et culturelles conséquentes.

À une date inconnue du XIe, le site fut condamné.
Il s’agissait peut-être seulement de vieux papiers inutiles et de textes remplacés par des versions plus récentes et conservés uniquement par respect ou nostalgie.
La communauté de Dunhuang continua à creuser des grottes et à les décorer jusqu’à l’époque mongole (1279-1368).
Puis après un millier d’années, les relations avec l’Asie centrale connurent un regain de tensions et le site fut abandonné.

Les grottes des mille bouddhas sont inscrites sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1987. La Chine considère ces grottes comme son plus important patrimoine culturel.

La grotte n°45 est décorée de scènes avec des Gardes célestes, des Bouddhas, les scènes profanes sont à gauche, sur le mur sud.

 

II – La technique

Contrairement aux fresques réalisées en Italie au Moyen-Âge qui nécessitaient une préparation sur base humide, à Dunhuang, il s’agit d’une préparation à sec à base de pigments, en raison de l’environnement.

Les fresques sont peintes sur un enduit de chaux appliqué directement sur les murs.

L’air très sec de la région a contribué à les conserver dans un excellent état.

Les quatre murs et le plafond de toutes les grottes sont ornés de peintures murales.

Les influences venues des quatre points cardinaux fusionnèrent en produisant une haute culture et une magnifique floraison artistique.

Les sujets représentés dans le style hindou, sont des bouddhas assis ou debout de toutes dimensions, la déesse Tara, des scènes de la vie et du culte de Bouddha, des hommes, des femmes, fidèles et prêtres.

La Chine se retrouve dans les plus grandes salles sous forme de paysages, de cités, ou de scènes de l’existence courante.

Les peintures et les sculptures se trouvèrent profondément marquées par la grandeur des Tang.

L’apogée du site de Dunhuang correspond aux trois siècles de l’âge d’or de la dynastie des Tang (618-907).

 

III – La peinture murale des Marchands.

C’est une scène réaliste et poétique, peinte à l’époque des Tang au VIIIe.

C’est une scène profane,  figurative  et narrative, sur un fond de paysage.

L’histoire se déroule dans le sens de la largeur.

Cette peinture montre le bodhisattva Avalokitésvara – célèbre en Chine sous le nom de Guanyin (dans sa forme féminine, il était le saint patron des voyageurs) – protégeant des bandits, un groupe de marchands, dans un paysage rocheux où règne le danger.

Guanyin porte un vêtement rouge. Il a une apparence indienne, bien que ses traits soient ceux d’un chinois.
Il est représenté debout sur un rocher légèrement surélevé par rapport aux marchands qui lui font face. Son attitude est protectrice. Sa main gauche est levée dans un geste signifiant la bénédiction et sa main droite est refermée sur le manche d’un long sabre porté haut sur l’épaule.
Devant Guanyin se tient une file constituée de deux groupes de marchands.
Le premiers groupe est formé par cinq personnages debout les mains jointes en prière. Ils sont coiffés de bonnets et portent d’amples tuniques gansées à la taille. Seules les tuniques du personnage qui ouvre et de celui qui ferme le groupe, sont colorées – verte pour le premier et rouge pour le second.
Les trois personnages du milieu ont des tuniques de la couleur du sable qui envahit toute la composition.
Un deuxième groupe composé d’un personnage et de deux chevaux suit.
Ce personnage a les mains levées dans une attitude de respect. Il porte lui aussi une tunique rouge.
Derrière Guanyin, en retrait, dans le renfoncement des rochers, sont représentés deux hommes le premier portant une tunique verte est sabre au clair, le second a le visage grisé, ces deux personnages figurent les bandits.

L’aspect longiligne des silhouettes dénote l’influence chinoise des Wei (439-456).

Cet ensemble de personnages répartis sur toute la largeur de la scène, occupent le premier plan de la peinture.
Un paysage vallonné, façonné de rochers parsemés de bosquets d’arbres stylisés, compose le second plan.

Le peintre accorde de l’importance à la beauté de son trait et pas forcément aux formes comme en témoignent les arbres stylisés.
Le contour des rochers est souligné par une bande ombrée verte.
Ce procédé artificiel lui permet d’étager  le  second plan et d’apporter de la profondeur à la scène dans une composition où il n’y a pas de perspective.

Les couleurs choisies équilibrent la composition.
Un dégradé de verts figure la végétation et un dégradé d’ocre figure les rochers.

Les jeux d’ombres et de lumières sont obtenus par des applications de sulfure mercurique et de poudre de plomb -pour les couleurs sombres.
Le temps a oxydé les composants des couleurs qui ont noirci, le rouge s’est assombri, d’autres se sont effacées (sur les chevaux et les tuniques du premier groupe).

Cette scène exprime le mouvement de la vie.

Le peintre recherche l’harmonie de l’ensemble (avec la disposition des personnages) et l’effet décoratif (avec les bandes ombrées qui scandent le paysage rocheux).

La composition affiche deux cartouches remplis en caractères idéographiques, l’un en partie haute au centre de la scène, l’autre plus petit est représenté dans la partie inférieur droite du mur peint.


IV – Le bouddhisme venu de l’Inde apporte une nouvelle façon de concevoir l’existence, bouleversant de fond en comble les perceptions chinoises.

Ce processus historique aboutit à une assimilation véritable sous les Tang au VIIIe.

Dans son ouvrage Histoire de la pensée chinoise Anne Cheng souligne que c’est
« Dés le premier siècle ap. J.C. que ce sont manifestés les premiers signes d’une présence bouddhique au Pays du Milieu ».

Mille six cents ans se sont écoulés depuis le creusement des grottes de Dunhuang, amorcé au IVe, dans ce qui est aujourd’hui la province du Gansu.

En dépit des vicissitudes de l’Histoire, des dommages causés par l’action conjointe du vent et du sable, les grottes et les cavernes abritant les fresques et les sculptures peintes, de Mogao, de Yulin et des cavernes de Mille Bouddhas de l’est et de l’ouest ont préservé leur trésor rupestre en très bon état.

Les couleurs éclatantes qui bouleversent les sens des voyageurs venus du désert à dos de chameau ou de mulet ont quelque peu disparu, même s’il en reste suffisamment pour imaginer l’effet spectaculaire qu’elles devaient avoir sur les yeux et l’esprit des croyants.

Peu à peu, l’art religieux exubérant et naïf laissa place à des styles plus sophistiqués, illustrant ainsi toute la variété des croyances et des rituels bouddhistes ainsi que les pratiques agricoles, architecturales et artistiques en vigueur le long de la route de la soie.

Les artistes qui ont réalisé ces peintures murales ont assimilé les techniques d’expression étrangères, (notamment hindoues) tout en les combinant
Avec les traditions héritées des deux plus grands bouleversements de la peinture qui ont eu lieu sous les deux premières dynasties, les Hang (206-220 av.J.C.) et les Tang (618- 907 av.J.C.)  et
Avec des minorités ethniques établies aux confins occidentaux de l’Empire.

Au fil du temps, les artistes expriment un intérêt croissant pour les thèmes de la vie et de la mort, du naturel et du surnaturel.
Leur technique évolue de la naïveté vers une relative sophistication ( comme le montre La peinture des Marchands).
 Leurs œuvres du Xe sont d’une grande maîtrise.

Les artistes cherchent à créer des scènes typiques et à marquer d’une empreinte résolument nationale l’art bouddhique.


Conclusion

Dunhuang est l’une des quatre préfectures de la région à l’ouest du fleuve Hexi.
C’est un nœud de communication entre l’Est et L’Ouest de la Chine.
La Route de la Soie, longue de 7000 kilomètres passait à Dunhuang, avec son va et vient incessant de commerçants, de moines et de voyageurs.

Les grottes de Dunhuang constituent le plus riche et le mieux préservé des sanctuaires bouddhiques dans le monde.

Le site de Dunhuang est d’un exceptionnel intérêt pour étudier l’histoire ancienne de la Chine.
Les peintures murales sont considérées comme des pièces patrimoniales.

Evelyn Brent -1920

En 1920, le studio Gorgeous a fixé pour l’éternité  le beau profil de l’actrice américaine, Evelyn Brent (1899-1975).
Sa carrière compte plus de 120 films dont un peu plus de 2 douzaines de films muets (dont 3 avec Joseph Sternberg).