Jeunes filles au piano P-A Renoir 2

Pierre-Auguste Renoir (1841-1919)

 

Jeunes filles au piano

1892

Huile sur toile

Dim 116 x 90 cm

Conservée au musée d’Orsay

C’est un des tableaux les plus célèbres de Renoir.
Il y a six versions achevées de Jeunes filles au piano
Cette toile a de grandes dimensions,
elle est peinte pour être regardée dans un musée.
Renoir peint Jeunes filles au piano en 1892 à la demande de l’état français. Il devient le premier peintre impressionniste exposé dans un musée national, le musée d’art contemporain le Luxembourg.

Ce tableau marque le début de sa reconnaissance.

 

Contexte

Dans la seconde moitié du XIXe la musique de chambre connaît un âge d’or avec des compositeurs comme César Franck, Claude Debussy et Gabriel Fauré.
À la fin du siècle, le monde de « La recherche du temps perdu » retentit de soirées musicales.

 

Description

Renoir représente un thème particulièrement apprécié de la peinture française du XVIIIe. Il peint un monde idéal. Des jeunes filles gracieuses sont face à un piano dans un intérieur élégant et feutré. Leurs attitudes suggèrent que nous assistons à une leçon de piano.

 

Composition

L’espace est très limité et articulé par un grand rideau à passementeries.
Devant le rideau, le premier plan est occupé par trois personnages : les deux jeunes filles et le piano. Le cadrage est serré. Le dessin est net et précis. L’ensemble cohérent.
Derrière le rideau, l’arrière-plan est flouté.
-À l’arrière-plan, le décor est davantage suggéré que décrit. On distingue des cadres dorés. Renoir dissout les formes dans un nuage de couleurs et fait, ainsi, ressortir le premier plan.
-Sur le rideau, le travail du drapé est un jeu de lumière et de couleur.
-Au premier plan, le dessin ferme et souple définit clairement les figures.
Le peintre utilise des petites touches longues et de légères superpositions de couches pour concilier le dessin et la couleur. La matière est lisse. Les couleurs sont franches, à peine modulées. Les blancs, rouges, bleus et jaunes renforcent l’impression de chaleur et de douceur. Renoir ne différencie pas les matières, il peint les rideaux, le piano, les robes, les fleurs, les chairs, les cheveux avec une précision égale.
Il vivifie la forme par la couleur.
Renoir disait : « je veux un rouge qui soit sonore, qui sonne comme une cloche, si je ne l’obtiens pas, j’ajoute plus de rouge ou d’autres couleurs jusqu’à ce que je l’attrape ».

Jeunes filles au piano est emblématique de sa période nacrée : les couleurs sont lumineuses mais, pastel.

Les figures ont le corps charnel des femmes que Renoir aime peindre dans ses nus. Sa palette de couleurs lumineuses et ses ombres légères servent les ondulations du corps. Le traitement rosé de la chair donne la candeur des joues des jeunes filles.
Renoir choisit ses modèles en fonction de leur peau. « …pourvu que je tombe sur une peau qui ne repousse pas la lumière ».
Amboise Volard raconte comment ce traitement pictural des chairs prenait toute son ampleur dans le travail de Renoir : « en quittant l’atelier je m’arrêtais devant des roses ébauchées, ce sont, me dit Renoir, des recherches de tons de chairs que je fais pour un nu ».

Cette scène d’intérieur transmet la coquetterie joyeuse des jeunes filles : elles sont coiffées, les rubans retiennent leurs cheveux et dégagent leurs cous. Les poignets sont nus. Le spectateur est devant une scène peinte sur le vif, un moment d’intimité volé.

Renoir joue sur les oppositions entre les jeunes filles l’une est peinte de profil, l’autre de trois-quarts. L’une est blonde, l’autre brune. La première porte une robe blanche, la seconde une robe rouge. L’une est assise et hésitante tandis que l’autre se tient debout et sûre d’elle. Cependant, leurs regards sont dirigés avec la même attention vers la partition, entrainant le regard du spectateur.
Elles sont dans leur bulle absorbées par la musique.

La lumière arrive de la gauche du tableau, caresse les contours des étoffes et des chairs et projette la scène dans une ambiance feutrée propice à la leçon de musique.

Entrer dans ce tableau c’est entrer dans un espace de lumière et de couleur.

L’activité musicale a un côté intime et profondément humain.
Le spectateur est touché par cette douce atmosphère convoquant ses souvenirs d’enfance.

 

Analyse

Dans cette toile Renoir a mêlé deux arts, la peinture et la musique.

Dans Jeunes filles au piano au premier plan, à droite du tableau, Renoir a peint plusieurs partitions qui suggèrent qu’en musique comme en peinture, l’apprentissage et la persévérance sont nécessaires.
Le piano est un personnage à part entière dans ce tableau.
Renoir montre ainsi la place que prend la musique dans ses œuvres.

Renoir disait « ce doit être très difficile dans le violon comme dans la peinture de trouver du premier coup le ton juste ».

La musique est un art cher à Renoir. Il l’aime depuis l’enfance, il l’a étudiée. Il a plusieurs amis musiciens. Il a souvent utilisé le thème du piano dans ses œuvres.
Il a peint un portrait de Wagner et dit à son sujet : « j’ai beaucoup aimé Wagner. Je m’étais laissé prendre à cette espèce de fluide passionné que je trouvais dans sa musique ».

Renoir affirmait que la musique lui était nécessaire et l’aidait à la création. « Vous savez quand cela ne va pas, une chose m’aide beaucoup, c’est la musique… ».

1890 est la décennie de la maturité et de la consécration.

Paul Durand-Ruel organise une exposition particulière de cent dix toiles. C’est une réussite, la reconnaissance pleine et unanime du public. Les tableaux de Renoir se vendent bien.

Renoir est un maître dans l’art d’évoquer la joie de vivre et la volupté.
Il a une merveilleuse vision du monde.
C’est un peintre authentique, il ne transforme pas, il recrée, tous les sujets lui servent de prétexte à des variations colorées.

Approchez-vous du tableau, vous entendrez des notes de musique s’échapper de la toile.