L’homme à la barre – Théo Van Rysselberghe

Théo Van Rysselberghe (1862-1926)

 

 

L’homme à la barre

1892
Huile sur toile
Dim 60,2 x 80,3 cm

Conservé au musée d’Orsay

 

Sujet

Le tableau représente un pêcheur en mer, son inquiétude face au grain qui se lève. L’homme sait qu’il va lutter et qu’il sera transi et fatigué.

 

Composition

Trois diagonales et une horizontale organisent le tableau :
Les diagonales forment un zigzag entre la barque, les filins et la vergue
L’horizontale est l’horizon : la mer et le ciel sur lequel se découpe un trois mats.

Ce bateau à grande voilure posé dans le lointain crée l’espace à la manière des estampes japonaises.

Le spectateur a un regard en plongée sur le pêcheur.
C’est un cadrage très moderne, frontal, avec le bateau en amorce, comme dans un instantané photographique.

Le ciré du pêcheur, son bateau et la vergue sont traités en couleurs complémentaires- rose-orangé et bleu pour le ciré et la barque – orange et bleu pour la vergue.
Pour les vagues, le peintre choisit deux verts, un bleu et du blanc.
L’écume est faite de blanc et jaune clair
Le ciel sombre contient des touches roses disséminées, crées à partir de petits points bleus et blancs

Avec ces couleurs Van Rysselberghe communique une sensation forte d’humidité, de froid et de vent.

Le peintre n’utilise pas le point mais une touche étirée en virgule qui suggère le dynamisme des flots et donne une vibration particulière à la surface de l’eau.

Van Rysselberghe est occupé par le rendu précis de la lumière.

Le pêcheur à la barre est sublimé par cette composition qui bannit toute anecdote.

 

Analyse

Comment Théo Van Rysselberghe s’approprie le pointillisme et l’adapte à son tableau

Le pointillisme est un effet optique et une technique de peinture qui orchestre des petites touches de couleurs complémentaires (des petits points, les uns à côté des autres)) pour restituer un tout unifié, le mélange des couleurs s’opère dans l’œil du spectateur.

Dans L’homme à la barre, Van Rysselberghe est à la lisière du pointillisme et peint une interprétation personnelle:  il adopte le pointillisme comme élément de style.

La mer est peinte avec précision ce qui contraste avec la volonté synthétique des peintres pointillistes français.

Le peintre donne plus de mouvement et plus de volume avec des touches plus larges.

Il abandonne les couleurs pures -il utilise deux verts- ce qui lui permet de diminuer les contrastes entre les touches de couleurs.

On observe la virtuosité avec laquelle il rend les reflets de l’eau, ou l’ombre sur le pêcheur.

La subtile alchimie des verts et du blanc contribue à transcender la force des vagues en leur donnant un aspect brillant… comme les écailles des poissons.

La gamme chromatique s’adapte comme si le peintre exprimait la sensation que la toile n’est plus éclairée mais que c’est de l’œuvre qu’émane la lumière.

Le pointillisme fait place à une composition où les points s’étirent en virgules à l’instar de Georges Seurat, Théo van Rysselberghe réalise des paysages marins avec une conception très réaliste.

 

Conclusion

Van Rysselberghe portera l’impressionnisme à sa maturité.
Après la découverte à Paris, du tableau de Seurat Un dimanche après-midi à l’île de la Grande Jatte, van Rysselberghe adopte le pointillisme qui culminera dans ses tableaux :
La promenade (1901) et Le thé au jardin (1904).

À partir de 1903 il choisira un style plus personnel et pendant les années de guerre, il reviendra vers un impressionnisme traditionnel influencé par les Fauves.

La beauté des couleurs, la sureté de la touche et le miroitement de la lumière des tableaux de Van Rysselberghe rayonne dans l’histoire du mouvement néo-impressionniste.

En cherchant toute sa vie l’équilibre entre la lumière et la couleur, il est arrivé à faire passer l’émotion dans ses toiles.

Dans L’homme à la barre la vibration qui se dégage de la lumière et des couleurs traduit le froid et la pénibilité du métier de pêcheur.

À l’instar d’Ensor, Khnopff ou Magritte, van Rysselberghe fait partie des grands artistes belges.

Théo Van Rysselberghe est un peintre incontournable de la vie culturelle à l’aube du XXe